Week-end Folles

« Quand j’ai découvert en 2018 le livre de Mâkhi Xenakis, Les Folles d’enfer de la Salpêtrière, j’ai été sidérée. Certes, je ne connaissais pas du tout l’histoire de ce bâtiment et je ne savais encore moins qu’il avait  été le plus grand lieu d’enfermement de femmes. Mais au regard de mes champs d’investigation et d’expérimentation artistiques  autour de l’identité féminine, mon intérêt a été assez vite piqué.

Il m’a fallu un an pour que se dessine l’endroit de rencontre possible entre les spectateurs et la matière proposée par Mâkhi Xenakis. Un projet a pris forme, un projet qui engageait des amatrices et des amateurs rejoints par des professionnels telles que Patricia Dallio (musicienne, compositrice), Lucile Guin (danseuse, chorégraphe), Janice Szczypawka (comédienne, metteure en scène) ; Hervé Lang quant à lui m’a épaulée pour conduire l’aventure jusqu’à son terme. Ils ont posé leurs regards singuliers sur le projet, et certains se sont mêlés, au fil de l’avancée du travail, aux participants.

Ensemble avec le soutien de La Machinerie 54 nous avons pu construire un spectacle participatif ambitieux.»

Anne-Margrit Leclerc, Direction du travail de la déambulation

© Justin Pleutin

« Le travail d’Anne-Margrit Leclerc et de sa compagnie est ici un terrain d’exploration en adéquation avec mon travail d’art sonore électronique qui consiste à transformer en flux organiques mouvants les espaces contenant les textes et les voix des comédiennes et comédiens en scène.

La proposition d’émettre  la composition et de la mixer durant le spectacle et celle de jouer en direct  les moments chorégraphiés me donne à vivre cette belle sensation d’être au cœur du texte bouleversant de Mâkhi Xenakis et de transformer l’expérience sonore en dialogue avec tous les partenaires de jeu. Folle parmi les folles j’ai la sensation de nourrir le propos à ma manière dans cette grande liberté offerte par les choix de mise en scène.»

Patricia Dallio - musicienne improvisatrice - compositrice associée à La Machinerie 54

« Avant de commencer ce projet, je n’avais aucune idée de ce qu’avait pu être l’histoire de la Salpêtrière. Le plongeon dans cet univers a été aussi captivant que choquant. Comment traiter d'un sujet si violent sans créer une pièce indigeste ou à l'inverse trop édulcorée par rapport à la réalité ?

La collaboration avec Anne-Margrit et Hervé m’a permis de distancier mon ressenti. Sans effacer la force percutante du texte de Mâhki Xenakis, j’ai cherché comment donner corps aux oubliées et aux enfermées de la Salpêtrière. Le corps parle, tout autant que les mots, et les moments chorégraphiés sont le discours des corps mis à l'épreuve, des corps qui endurent sans aucun commentaire.  Ma place dans la construction de la Déambulation des Folles d’enfer s’est trouvée en mettant l’accent sur l’expérience physique de l’enfermement et de la contrainte.


Les notions de groupe et d'individus ont été très présentes dans mon travail. Dès le début nous avons rêvé d’un chœur avec Anne-Margrit ; dans un contexte sanitaire compliqué c’était un joli défi ! Toutes et tous ont joué le jeu et au fil des répétitions le chœur est apparu, réel et impalpable. Les corps éprouvaient ensemble, des corps liés et pourtant différenciés.
La beauté de ce projet tient à l'expérience humaine partagée, à l’attention, à l'écoute des uns et des autres et à son exigence. La forme choisie de déambulation dans un lieu remarquable du territoire permet de diversifier les points de vue, met en mouvement les corps des spectateurs et au final ramène du vivant dans la matière sombre du texte de Mâhki Xenakis.
Pina Bausch disait "Dansons, sinon nous sommes perdus", ici je pourrais dire "nous sommes perdus, alors dansons". »

Lucile Guin, Chorégraphe

« Lorsque j’ai lu Les folles d’enfer de la Salpêtrière de Makhi Xenakis, j’ai d’abord été charmée par la forme singulière de cet ouvrage. Sur les pages blanches, des mots, des grappes de mots s’entassent, se cognent, se séparent.
Au-delà de la forme, le fond est encore plus percutant. Je suis troublée par l’histoire que je découvre, troublée par l’Histoire ayant cachée si longtemps cette histoire que je découvre.
Ces femmes entassées, cognées, séparées, souvent sans raison.


Ces femmes martyrisées, vendues, violées.
En hommage à ce continent noir, j’ai conçu des robes blanches, beiges, écrues, à partir de bric et de broc*, avec May B de Maguy Marin, comme source d’inspiration première.


Patricia Dallio a confectionné ces chapeaux fous qui apportent une touche d’humour à cet univers carcéral.
Telles des prisonnières fantomatiques, ces revenantes envahissent l’espace de Saint-Pierremont et invitent les spectateur.ices à s’engouffrer dans les abysses de la Salpêtrière, la corde au cou.

*De Bric et de broc : Costumes éco-responsables, tissus recyclés, vêtements récupérés, découpés, cousus, décousus. »

Janice Szczypawka, Scénographie et regard artistique

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« Rien qu'à l'évocation de ce que le texte de M.Xenakis contenait, je me doutais qu'il serait difficile à lire, à  recevoir. Ceci dit, après avoir plongé dans l'écriture sur Auschwitz de Charlotte DELBO, cela faisait une nouvelle expérience des horreurs dont l'homme est capable.

Ce texte m'a fait découvrir une réalité que je ne connaissais pas, l'histoire de La Salpetrière, le traitement de ces femmes de tous âges ; ceci dit je pense que celui des hommes à Bicêtre ne valait guère mieux. Ceci est l'histoire des pauvres, miséreux et  personnes hors normes que  les puissants ne supportent pas ou ne se soucient guère.

Ce texte trouve -hélas- une résonance dans d'autres époques et dans la nôtre aussi.

Je savais donc la teneur de ce texte ; si j'ai accepté de participer à la 1ère phase de travail sur le texte ,c'est que je trouvais intéressant de participer au décorticage du texte- non théâtral à la base- et de voir quelles matières on allait en sortir.

Ce fut très intéressant même si par moments c'était dur pour moi de lire ou d'entendre ces mots. J'espère que ce travail a été utile pour Anne-Margrit et Hervé.

J'ai hésité à m'engager dans la 2ème phase /dureté de ce texte, de ce qu'il raconte et mon humeur personnelle du moment.

En même temps, je fais toute confiance  à Anne-Margrit et Hervé qui réalisent toujours des spectacles de qualité.

La perspective de travailler en groupe (tous les fous et folles sont très sympas!! et j'inclue les intervenants), de savoir qu'il y aurait de la danse, de la musique etc... m'ont décidée autant que de savoir que ce serait un travail abouti. Je pense que ce sera le cas.

Quant aux difficultés, il y en a toujours quelques-unes mais cela fait partie du jeu...

Mon espoir est que l'on puisse redonner ce parcours théâtral à une autre occasion ou autre endroit .

Le travail théâtral est finalement pour moi toujours une aventure avant tout humaine en cela que par le texte abordé on plonge dans l'humanité de l'Homme et que dans le travail mené ,on partage avec les autres « acteurs » une expérience d'humains donnant le meilleur d'eux-mêmes pour créer un objet théâtral. » Chantal Gobert

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«Lors d’un stage en juillet 2020, Léa Thomen nous fait part de ce projet dans lequel elle devait assurer (initialement) la partie chorégraphie, nous incitant à nous y inscrire dans le volet danse.

Connaissant le travail de Léa, malgré ma totale inexpérience (y compris en danse), je décide de franchir le pas sans bien savoir, mais puisqu’elle me faisait confiance…pourquoi pas ?

Avec un peu de retard puisque je n’ai pas participé à l’écriture, je suis entrée dans cette univers de Mâkhi Xenakis pour le moins perturbant, pour ne pas dire terrifiant. A ce moment je me demandais ce qu’on pouvait bien faire de cela.

Je suis venue pour la danse, et me voici propulsée sur le plateau en théâtre, et puisque cela ne suffisait pas, un peu de chant aussi ! Alors je me laisse guidée, j’essaie, j’apprends.

Cet événement est pour moi une expérience inédite, un privilège fantastique de découvrir et de vivre le dessous des cartes de la création artistique. Je découvre, je vis, « à mon âge, surtout à c’t’âge de moi qu’est plus un âge » (clin d’œil à Hervé) la patience, la bienveillance, des metteurs en scène, le savoir-faire, l’imagination, de tous ces professionnels artistes.

En cette période si particulière que nous vivons, je reçois cette aventure comme un véritable cadeau, merci à tous. » Doris Stoeckel

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« - Qu'est-ce qui vous intéresse dans ce projet autours de folles d'Enfer de la Salpêtrière ?
La multiplicité des points de vue : musical (j’adore les objets hétéroclites avec lesquels la musicienne, Patricia, compose !), vocal (le chant (c’est joyeux et ludique) et le travail de la voix (c’est compliqué)), corporel, chorégraphique et théâtral (le texte, le parcours à Saint-Pierremont, la salle et le jardin (j’aime ce lieu à deux pas de chez moi).
Le processus créatif en train de se faire.

- Qui ce qui vous a donné envie de rejoindre ce projet ? - Que ce qu'il vous a apporté ? vous a fait découvrir ?
Le texte de Maki Xenakis, Les Folles d’enfer de la salpêtrière, écrit comme une partition, entre prose, pause et poésie.

- Quelles ont été les difficultés rencontrées, s'il y en a eu ?
La combinaison des plannings professionnels et des répétitions de théâtre !

- Et au contraire, quelle a été votre plus grande joie sur le projet ? plus bel accomplissement ?
Danser et chanter ! avec Lucile, Janice, la choriste, leur créativité et leur bienveillance !
être dehors, sous le ciel bleu de la fin de l’hiver avec la migration des oiseaux et Anne Margrit qui râle, tournée vers la construction et la création du spectacle !
retrouver le groupe pour partager cette aventure au fil ses saisons

- Quelque chose à ajouter ?
Merci à toutes et tous ! » Patricia Szafranski

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« Au départ, j'avais simplement l'intention d'être dans la découverte d'un atelier théâtre classique.

Anne-Margrit m'a proposé de participer à ce projet qui pour moi était un grand point d'interrogation.

Je venais justement, fin 2019, de lire un livre sur l'historique et l'évolution de la médecine en France. Pinel, Charcot etc… y étaient référenciés bien sûr.

Ce lieu "La Salpêtrière", une ville dans la ville, je l'avais découvert en 2011-2012. Si je devais m'y rendre aujourd'hui, la sensation y serait tout autre. En 2011, c'était déjà un lieu, pour moi, très surprenant, par sa dimension, son architecture. Jamais je ne me serais imaginée un tel passé, un tel vécu.

Que me diraient ces murs, ces couloirs, ces rues, ces indications ? ? ?

La première lecture du livre de Mâkhi Xenakis m'a glacée. Le travail de la première année sur le texte "Les folles d'enfer de la Salpêtrière", la façon d'écrire, de décrire de l'auteur m'a interpellé aussi.

La rencontre en septembre 2020, à Nancy, de Mâkhi Xenakis m'a permis plus de compréhension sur cette façon de transmettre de l'auteur. Quelle profondeur !

Respect à Anne-Margrit pour avoir mis en scène, transcrit cet univers, ces émotions, cette folie ! Cet univers de Femmes  et d'homme-animal.

Toutes les dimensions ont été travaillées avec Hervé, Lucile, Janice, Patricia, Mylène.

J'ai tout découvert de ce travail artistique et me suis laissée portée par le travail de toutes ces personnes citées. Elles ont fait transpirer en nous cet univers  fou et vont le transmettre au public - Un Passé remis au Présent - » Marie-Claire Urbanski

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« J'ai d'abord été intéressée par le travail dramaturgique sur le texte de Makhi Xenakis.(sa forme originale et son propos)  Ensuite le projet de réalisation qui a mêlé les différents langages (danse,  musique et  jeu,  travail chorale...) La richesse du travail est venue aussi de la diversité des intervenants professionnels et de la diversité du groupe des participants

La formule weekend est assez efficace: elle permet de mûrir lentement le travail.

... Et puis beaucoup de plaisir à travailler ensemble sur ce projet. » Maryvonne Rousseau

« La lecture des extraits d'archives de la Salpêtrière recueillis par Makhi Xenakis m'a évidemment beaucoup remuée, perturbée. Quoi? Encore? C'est donc cela notre matrimoine? Après les bûchers du moyen-âge, encore la cruauté des pouvoirs, de l'Eglise ; la violence, l'injustice, l'orgueil et la bêtise des hommes ! Comment ne pas aussi penser à Auschwitz en découvrant ce lieu au cœur de Paris où l'horreur infligée aux femmes était si minutieusement orchestrée, minutée? 

L'invitation d'Anne-Margrit et de Hervé à embarquer sur ce projet m'a remplie de joie et d'inquiétude. La nécessité de plonger, de creuser davantage ce passé enfoui, de le faire connaître à notre entourage, à notre époque, pour éviter qu'il n'obstrue notre avenir. 

Pour le présent, ce travail collectif fut une expérience riche, un échange chaleureux, complice et jubilatoire avec les folles (et quelques fous) du plateau, des coulisses. Ce n'était décidément "pas mieux avant", comme se plaisent à dire certains de nos contemporains, car pour moi, comme pour d'autres sœurs, à ce moment fantasmé d'une heureuse révolution, nous aurions fini, c'est certain, enchaînées, torturées, bouffées par les rats, à la Pitié Salpêtrière. » Aldjia Moulaï

« L’intérêt que j’y ai trouvé repose d'abord sur la lecture du livre de Makhi Xenakis, découvert un soir de repas chez Anne Margrit, découverte de ces situations de femmes empêchées d'être au nom de la religion, de la morale, du fait même d'être une femme. Découverte des conditions abominables‌ de leur rétention, des traitements qui leur ont été infligés, qui résonnent fort aujourd'hui encore pour nombre d'entre elles. Découverte de cette écriture poignante et si poétique qui leur rend grâce.

Le travail de la première année sur le texte a été une nouvelle expérience pour moi, o combien enrichissante. Les deux années de travail théâtral, de chorégraphie - totalement nouveau pour moi, le travail autour de la musique, le travail de chœur ont été aussi des moments de découverte, des moments de partage très forts, des moments de joie profonde de voir que ce groupe fonctionne si bien. En effet, et c'est une de mes grandes joies, et espérances, toutes et tous se sont engagés à fond, donnant à chaque fois toute l'énergie, la réflexion intellectuelle l'écoute aux autres, le respect de chacun et chacune. Le groupe a fonctionné sans chef ou cheffe, chacun se sentant impliqué dans le projet, et les décisions prises collectivement ont été respectées. Malgré les difficultés (fatigue, froid !!) tout le monde a tenu bon, porté par le désir et le plaisir de réaliser un spectacle unique, exigeant et juste. J'y ai rencontré des personnes formidables, respectueuses, créatrices, humainement ouvertes aux autres, chaleureuses et joyeuses d'être associées à ce beau projet.
Mon seul regret est que cela se termine le 9 avril !!!!

Nous avons eu la chance de participer à un projet artistique, politique et humain formidable,
Merci à toute l'équipe qui a permis cette belle réalisation.» Sophie Chevriaux

« - Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce projet autours de folles d’Enfer de la Salpêtrière ?
- mettre en vie des vies qu'on a voulu éteindre.

- Qui ce qui vous a donné envie de rejoindre ce projet ?
- refaire du théâtre,
- travailler un texte non théâtral au départ !

- Que ce qu’il vous a apporté ? vous a fait découvrir ?
-plein de découvertes artistiques avec la danse et le son !

- Quelles ont été les difficultés rencontrées, s‘il y en a eu ?
- travailler un texte sans dialogue !

- Et au contraire, quelle a été votre plus grande joie sur le projet ? plus bel accomplissement ?
- réussir un chœur ! un chœur de danse ! » Athéna Seyed Esmaïl

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« La première fois que j’ai lu le texte de Mâhki Xenakis, j’ai été à la fois séduite, choquée et glacée. J’ai ressenti une réticence pour deux raisons: Le sujet était lourd, le texte dur, et je n’arrivais pas du tout à imaginer comment on pourrait transformer le texte en une matière théâtrale.

Et puis finalement ce sont ces deux raisons, entre autres (comme la confiance que j’avais en Anne-Margrit et Hervé), qui m’ont décidée à m’embarquer dans l’aventure:

La curiosité de voir comment nous allions nous colleter avec le texte, “mettre les mains dedans”, puisque le travail collectif commençait déjà là.; et l’urgence, l’urgence de dire, même quand on préfèrerait prendre en solitaire le coup de poing que représente ce texte, le digérer et passer à quelque chose de plus léger. Toutes mes appréhensions ont été balayées et la participation à ce projet s’est révélée joussive et lumineuse.

Aborder la danse et le chant, disciplines nouvelles pour moi, vivre en direct la création d’une partition sonore, expérimenter le jeu avec un si grand nombre de partenaires, participer à l’écriture de petits textes insérés dans le spectacle…

Voici pêle-mêle mes difficultés/joies/découvertes tout à la fois. Ah et puis ce grand bonheur aussi: sentir tous ensemble quelque chose gronder  dans nos coeurs quand tout à coup l’esprit des folles descendait sur nous! » Sylvie Barre

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«Lorsque l’on m’a proposé de participer au projet d’écriture et de création de « la journée folle », j’ai dit oui sans hésiter, mais en n’ayant qu’une idée très partielle de ce dans quoi je me lançais !

C’était d’abord l’envie de m’investir dans un projet d’envergure, de vivre un évènement extraordinaire de l’intérieur, de découvrir une manière de travailler originale avec de nouvelles personnes, de dépasser mes appréhensions…

Le choix du sujet m’interpellait aussi car l’histoire de la Salpêtrière, qui la connait ? Il entrait en résonnance avec des sujets d’actualité : la crise des hôpitaux, la réforme de la psychiatrie, la lumière faite sur les « sorcières » dans son sens noble, MeToo…

La première plongée dans le texte de Mâkhi Xenakis a été bouleversante ; je l’ai lu en apnée, physiquement et psychologiquement… Whoua ! Quelle responsabilité d’incarner ces folles, de faire revivre leur corps, de raconter leur histoire, de faire entendre leurs voix !!!

La 1ère année de travail sur le texte m’a permis de l’approfondir tout en prenant de la distance émotionnellement. J’ai particulièrement apprécié de voir comment on pouvait le transformer sans le dénaturer, pour en faire une œuvre qui puisse être mise en scène.

Je tire mon chapeau à Anne-Margrit Leclerc, parce que franchement, au départ, ça me paraissait assez incroyable d’y parvenir, et vraiment courageux, comme projet !

Lorsque nous avons commencé à répéter, ça a encore été une nouvelle découverte pour moi : le travail de plateau, l’ajustement des scènes pour que le texte sonne juste, donner à voir parfois (souvent !) sans rien dire ; travailler sur les corps, les ressentis… Les participations d’Hervé Lang, de Janice Szczypawka, de Lucile Guin, de Patricia Dallio sur le projet ont ouvert de nouvelles dimensions sensorielles, avec un rapport aux corps, aux sons, à l’espace, au visuel, aux voix, poussé à l’extrême.

Aujourd’hui, alors que l’échéance de la représentation approche, j’ai hâte de présenter l’aboutissement de ces 3 années de création !!! Avec un regret tout de même : celui de ne pas pouvoir y assister en tant que spectatrice ! » Lysiane Savoyant

 

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« Lorsqu’Hervé m’a proposé de venir rejoindre le groupe des Folles, le travail de remaniement et d’écriture du texte était déjà fait, j’ai donc découvert le texte « adapté ».

Je ne connaissais pas le sujet, je n’avais même jamais entendu parler de ces « Folles » de la Salpêtrière (j’ai lu, plus tard, le livre de Mâkhi Xenakis).

La première lecture de ce texte a été un choc. J’ai dû m’y reprendre à plusieurs fois avant de pouvoir aller au bout : trop violent. Obligée de faire des poses pour absorber ces images de tortures, d’enfermement, de soumission, d’humiliation, d’inhumanité. La nausée me venait en découvrant l’inimaginable.

Mais j’ai dit oui, oui, oui à ce projet ambitieux. Trop heureuse de jouer, de danser, de chanter, de participer à ce grand spectacle, trop heureuse « d’être » une folle, de défendre la mémoire, la parole de ces femmes dont je me sens proche, mais comment ne pas l’être ? Trop heureuse de rencontrer Anne-Margrit (avec qui le travail n’est pas toujours facile (elle me secoue, me secoue !), mais...le théâtre...c’est difficile), et aussi Janice, Patricia, Lucille, Mylène. Je suis très admirative de leur travail, de toutes leurs compétences. Leurs exigences me poussent à sortir de ma réserve et nous tirent tous et toutes vers le haut.

Et puis ce groupe, ces belles rencontres, ce groupe engagé qui m’a fait tenir quand je me décourageais d’y arriver. Ce groupe qui me porte quand on est tous ensemble : sentir leur présence, leurs corps, leurs voix proches de moi (dans l’Assemblée des Femmes, dans les chorégraphies, le chant) : on se sent unis, soudés, solidaires. J’aime à penser, qu’à la Salpêtrière, parmi les tisseuses, les brodeuses, les tisserandes, et malgré le silence exigé, des liens, des amitiés sûrement naissaient parfois qui leur permettaient de tenir dans cet enfer.

Alors un grand merci à tous, à Hervé d’abord qui, en m’invitant sur ce projet,  m’a sortie de ma torpeur liée aux enfermements des confinements successifs, et puis un grand merci à tous, j’aime beaucoup les créations musicales de Patricia, j’aime beaucoup danser, jouer avec vous, merci pour vos sourires, pour ce que vous m’avez apporté sans le savoir, merci pour tous ces beaux week-ends de répétition depuis 2 ans. J’ai une chance inouïe de faire partie de ce projet ! Et puis, on a tenu malgré toutes les contraintes !!! Quelle belle aventure !!!

Maintenant on y est. J’ai peur…. J’espère ne pas décevoir. J’ai hâte et en même temps, je sais déjà que vous allez tous beaucoup me manquer quand nous aurons fini de jouer.

Mais qui sait, peut être nous retrouverons-nous sur d’autres projets, d’autres paroles, d’autres luttes ?…. » Annie Camut

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